Logan

Un dernier round

Nicolas Winter
Juste un mot
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5 min readMar 11, 2019

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Après le succès en demi-teinte du second opus des aventures solo de Wolverine, Le Combat de l’Immortel, James Mangold rempile pour un épilogue sombre et mélancolique. Ou du moins annoncé comme tel par la campagne promotionnelle organisée par la 20th Century Fox. Pourtant, on ne peut pas dire que Logan ait eu réellement l’occasion de briller dans les deux précédents volets…toujours à la recherche d’un méchant à la hauteur et, surtout, d’une mise en scène avec du caractère. Vaguement inspiré par le fameux comic book Old Man Logan de Mark Millar (impossible d’adapter à cause des problèmes de droits au cinéma des univers Marvel…), Logan a également la lourde tâche de mettre fin à une époque puisque deux des acteurs les plus célèbres de la franchise, à savoir Hugh Jackman et Patrick Stewart, tirent leur révérence. Malgré le sentiment mitigé laissé par le précédent opus du même Mangold, Logan peut-il donner une fin digne de ce nom au mutant le plus célèbre de la saga X-Men ?

Dans un futur incertain, Logan n’est plus le Wolverine d’antan. Vieillissant, le super-héros est las de son existence remplie de désillusions. Caché à la frontière mexicaine avec un autre rescapé des X-Men, Charles Xavier, il tente tant bien que mal de garder celui-ci à l’abri des autorités. Contacté par une mystérieuse inconnue, Logan doit protéger une jeune fille, Laura, qui semble être pourchassée par un groupe de mercenaires dirigé par l’impitoyable Donald Pierce pour le compte d’un certain Dr Zander Rice. Désormais en fuite, Charles Xavier, Logan et Laura devront passer la frontière canadienne pour échapper au funeste destin qui attend les mutants dans une Amérique qui ne veut désormais plus d’eux. Mais Wolverine est-il encore en état de protéger les siens ?

Logan tranche sur plusieurs plans avec ses prédécesseurs. D’abord en ce qui concerne l’ambiance. Même si l’on retrouve le ton torturé inhérent à l’histoire de Wolverine (cela fait près de huit films qu’on nous le répète), le long-métrage s’intéresse à un futur très noir pour la race des mutants puisque ceux-ci ont quasiment été exterminés par les hommes. Dans une atmosphère à mi-chemin entre le post-apocalyptique et le western, Logan raconte la fin, et cela dans tous les sens du terme. La fin des mutants avec des héros qui aujourd’hui ne sont plus que des ombres fatigués, Wolverine en tête naturellement, la fin d’un monde avec un aspect crasseux omniprésent et la fin de l’innocence avec l’histoire de Laura, enfant torturée et brisée devenue adulte trop rapidement. De ce fait, le film s’avère rapidement plus sec, plus âpre. Hugh Jackman, toujours aussi excellent dans son rôle fétiche, traîne sa gueule burinée dans une Amérique ultra-violente où tout espoir de renaissance a disparu.

Violent, Logan l’est assurément. Le sang gicle, les têtes volent, les membres tombent…Le dernier film de la trilogie ne fait pas dans la dentelle et le résultat en est d’autant plus réjouissant, en parfaite osmose avec la brutalité animale de son héros mais aussi de son époque. Les combats, nerveux et sanglants, rythment l’histoire avec cette touche de violence qui semble attendue depuis longtemps dans la saga. Mais malgré tout, la franchise ne peut se dépêtrer d’une certaine redites dans la peinture de Wolverine, certes excellemment mis en valeur cette fois, mais qui ne fait qu’enfoncer le clou par rapport aux volets précédents. De même, Logan n’a toujours aucun méchant digne de ce nom. Pierce, malgré tout le charisme de Boyd Holbrook à l’écran, n’a pas de pouvoir capable d’inquiéter Wolverine…et le seul vrai antagoniste du film apparaît bien peu original (même si l’intention sous-jacente, confronter Logan à son passé de façon très directe, n’est pas sans avoir une certaine pertinence.).

Outre les problèmes récurrents de la série, Logan souffre aussi de sa campagne promotionnelle et de sa volonté clairement annoncée dès le départ de conclure la série. Personne n’ignore en entrant dans la salle que le film fait figure d’épilogue et le dénouement final ne fait aucun doute, le suspense s’en trouve donc fortement amoindri pour ne pas dire complètement annihiler. Prévisible donc mais réjouissant tout de même. Il faut l’avouer malgré tout, Logan évite les pièges récurrents qui se sont installés dans l’univers Marvel au cinéma. Son ton désespéré et désespérant ainsi que sa structure de road-movie en font une oeuvre un peu à part tout en donnant la sensation d’assister à un spectacle un tantinet plus adulte sans pour autant tomber dans un sérieux pesant. De même, malgré toutes les critiques quand à l’impression de déjà-vu autour de la vie torturée de Wolverine, force est d’admettre que le personne possède une histoire toujours aussi captivante à l’écran, d’autant plus avec cette mélancolie lancinante qui ne cesse de peser sur le spectateur au fur et à mesure que l’aventure avance. Les deux autres personnages principaux ne déméritant pas, à savoir X-23 aka Laura et Charles Xavier, l’une faisant une entrée fracassante dans l’univers X-Men (sa jeune actrice, Dafne Keene, est une petite révélation), l’autre trouvant une fin touchante à la hauteur du personnage. Reste alors à pointer du doigt le parallèle savoureux (fortuit ?) entre la politique actuelle des Etats-Unis et la chasse aux enfants mutants (et étrangers !) du long-métrage…qui finissent par rejoindre le Canada en partant du Mexique. En un sens, on espère que Logan ne sera pas trop clairvoyant sur l’avenir.

Meilleur volet d’une trilogie très inégale, Logan offre une conclusion digne de ce nom à un héros passionnant. Le dernier film de James Mangold, aussi sauvage que mélancolique, met un terme à une époque, sans scène post-générique, sans happy-end et surtout sans retour en arrière cette fois. Une belle conclusion en somme.

Note : 8/10

Meilleure scène : Charles Xavier et Logan dans le château d’eau en ruines

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